dimanche 7 septembre 2008

"Le Montespan" - Jean Teulé

Eh! oui, je suis cocu, j'ai du cerf sur la tête… par Lhisbei

« Eh! oui, je suis cocu, j'ai du cerf sur la tête,

On fait force de trous dans ma lune de miel,
Ma bien-aimée ne m'invite plus à la fête
Quand elle va faire un tour jusqu'au septième ciel.

Au péril de mon cœur, la malheureuse écorne
Le pacte conjugal et me le déprécie,
Que je ne sache plus où donner de la corne
Semble bien être le cadet de ses soucis. »

Georges Brassens

La Grande Histoire s’est attachée aux pas de Louis XIV, le Roi Soleil, dont les 72 années de règne ont profondément marqué la France (en plus de nombreuses guerres, de l’instauration d’une monarchie absolue de droit divin, de la révocation de l’édit de Nantes, on lui doit le château de Versailles). La petite histoire a retenu le nom de Françoise Athénaïs de Rochechouart de Mortemart ou plutôt son titre de marquise de Montespan, favorite de Louis XIV pendant plus de 10 ans, compromise dans une sombre histoire d’empoisonnement et héroïne de nombre de romans historiques. Pour la petite histoire, donc, La Montespan fut reléguée aux oubliettes par Mme de Maintenon, une femme très pieuse et, disons-le, quelque peu austère, dernière maîtresse du Roi et qui réussit à s’en faire épouser, ce qui prouve tout de même une forme d’intelligence… (pour ceux que la petite histoire intéresse, lisez « L’allée du Roi » de Françoise Chandernagor).

Jean Teulé, lui, se fiche de la petite histoire ou de la Grande Histoire. Ce qui l’intéresse c’est la poussière sous le tapis de l’Histoire, celle qu’on planque en faisant le ménage et qu’on oublie avec le temps. La poussière, dans le cas présent, s’appelle Louis Henri de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespan et époux de La Montespan. Le Montespan, le mari cocu, inconnu pour la Grande Histoire, ignoré par la petite, voilà le « héros » du roman de Jean Teulé. Ses plus grands faits d’armes ? Avoir fait un scandale à la Cour en apprenant que le Roi Soleil se tapait sa femme, avoir décoré son carrosse de bois de cerfs, symboles du mari trompé, et, surtout, avoir osé faire la morale au Roi en personne, ce qui lui valût un séjour en prison puis un exil sur ses terres. Il s’en est tiré à bon compte, le Roi aurait pu le faire exécuter. On ne conteste pas impunément un pouvoir aussi absolu…

Notre « héros » le marquis est donc un mari cocu, amoureux de sa femme (à cette époque les mariages où l’on s’aime ne sont point l’usage), bon vivant mais constamment fauché. Le Montespan est surtout un grand naïf, qui n’a rien compris à son époque. La réputation de coureur de jupons du Roi n’est plus à faire. La cour est un vrai lupanar. Alors quand on a une très belle épouse, que tout homme normalement constitué dévore des yeux, on évite de la mettre sous le nez d’un roi volage et porté sur les plaisirs de la chair. A fortiori quand ladite épouse a la langue bien pendue, possède un don naturel pour se moquer et assassiner d’un trait bien senti ses rivales, qu’elle aime le luxe et qu’elle n’a pas froid aux yeux – dans la vie comme au lit. Et, quand l’épouse prévient à deux reprises qu’elle ne pourra résister longtemps au Roi, on évite de la renvoyer à la cour… Mais le Montespan est un très grand naïf, qui comme tout grand dadais, se trouve surpris quand l’adultère survient. Plutôt que d’en profiter pour tirer un peu de la fortune des caisses du Roi en dédommagement, il préfère réclamer à cor et à cri sa femme et s’époumoner en vain, devenant la risée des courtisans. L’honneur est à ce prix, soit.

J’ai vraiment eu du mal à m’attacher à ce Montespan, personnage un peu pathétique et ridicule. Malgré la plume vive et la verve de l’auteur, sa drôlerie, sa façon de jouer avec les mots et la langue, la cocasserie et le burlesque qui émaillent le récit, cette farce outrancière ne m’a pas totalement convaincue. Le rythme est inégal : certains passages m’ont beaucoup fait rire, d’autres m’ont profondément lassée. Et la vie de Montespan, telle que racontée par Jean Teulé, ne mérite pas qu’on soulève le tapis.

Lire aussi l'avis de Laiezza

1 commentaire:

  1. Outrancier, voilà, c'est le mot juste. Le reste de mon avis... Dans mon billet :)

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