lundi 2 juin 2008

"Nuit ouverte" - Clémence Boulouque

Cosmique. Iréelle, par Sandrounette


« Et la nuit s’est ouverte et elle est restée déclose. » Paul Celan

Il y a certains auteurs qui nous marquent. D’autres qu’on ne serait probablement pas allé découvrir seul.
Et au hasard d’un café littéraire, on fait une rencontre. Cosmique. Irréelle.

Une jeune femme se présente. Toute frêle, à peine trente ans, avec un regard qui semble perdu. Après l’avoir saluée dans le hall, je m’installe tranquillement, prête à écouter parler ce petit moineau.

Le roman qu’elle vient nous présenter se nomme Nuit ouverte.

L'actrice Elise Lermont décide d'incarner le personnage de Regina Jonas, première femme rabbin au monde, ordonnée en 1935, décédée à Auschwitz en 1944. Grâce à ce rôle, Elise espère se libérer d'une culpabilité remontant à l'époque de l'Occupation allemande, pendant laquelle ses grands-parents se livrèrent à de troubles activités.

Le premier contact avec le livre a été douloureux. Les mots ne trouvaient pas de résonance en moi. Je peinais. Puis, vint la rencontre avec Clémence. Une femme forte malgré son apparence, d’une culture incroyable (elle parle 7 langues dont le russe et l’hébreu).
Pourquoi a-t-elle choisi de mettre en lumière le personnage de Regina Jonas ? en consultant un dictionnaire, elle tombe par hasard sur le nom de cette femme. Etrange coïncidence : Regina et son père (le juge Boulouque, chargé du dossier des attentats de Paris dans les années 80) sont nés et morts le même jour… Il n’en fallait pas plus à l’auteure pour partir à la recherche de cette première femme rabbin.

Ainsi, le nom de Regina Jonas nous parvient. Le mérite de Clémence est de ne pas être tombée dans le piège de la biographie romancée. Comme elle nous l’a expliqué « je me voyais mal écrire : Regina se leva et alla beurrer sa tartine ». Il fallait un style plus épuré qui relate les choix et les principes de Regina sans tomber dans la trivialité et la familiarité.

« L’histoire endort son souvenir. Regina Jonas est ensevelie d’oubli car on ne pardonne pas facilement à ceux qui ouvrent la voie mais ne réclament rien, et Regina n’était le tambour d’aucune cause. […] Quelques-uns prononcent son nom comme un mot de passe. Comme un être bon, dont le souvenir apaise. »

Les chapitres s’alternent entre la vie de Regina et la vie de la grand-mère d’Elise sous l’occupation, une vie de luxe, exempte de toute compassion. L’antithèse dégagée offre au roman un rythme binaire qui nous laisse à bout de souffle.

La plume de Clémence Boulouque est magnifique et c’est une auteure que j’ai hâte de retrouver !

...

3 commentaires:

  1. Je l'ai lu, et c'est vrai que c'est très bien !

    Très joli texte, Sandrounette ! Tes critiques sont de mieux en mieux, je trouve, et c'est un plaisir de t'avoir parmi nous :)

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  2. C'est vrai qu'elle est gentille, Clémence !

    (désolé, hein, c'était trop tentant)

    Mais SURTOUT... elle est super jolie !!! Et c'est quand même vachement plus important que ses livres !!!

    ;-)

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  3. Je plussoie Laiezza. Ta critique est vraiment très bonne. Ca donne envie de découvrir qui se cache derrière ce nom ridicule (Oh zut, je m'étais promis de pas le faire! ;-))

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