mercredi 25 juin 2008

"Les enfants du plastique" - Thomas Clément

Et maintenant, une critique rock, par Laiezza

Juste avant de partir en vacances, je regardais le documentaire que Jimmy consacrait à Thierry Ardisson, animateur que j'aime bien, comme beaucoup de gens, surtout parmi les amateurs de rock. Justement, Ardisson disait à un moment avoir voulu produire "des émissions rock", plutôt que "des émissions sur le rock". L'idée se tient, et elle est louable. Problème : je peux me tromper, mais à mon avis, si la musique rock sans l'état d'esprit n'est rien, l'état d'esprit sans la musique rock n'est pas grand chose, non plus. Or, il suffit de regarder une émission d'Ardisson cinq minutes, pour voir que sa culture en la matière est plutôt limitée, finalement très consensuelle, mercantile, et démago. Parce que c'est compliqué, son idée : il ne suffit pas de connaitre les Stooges pour être rock. Ce serait trop facile. Il faut encore les comprendre.

Aussi me suis-je demandée ce que Thom, avait fumé le jour où il a qualifié "Les enfants du plastique" de "livre rock" (appellation que, de toute façon, j'ai toujours trouvée idiote). J'ai trouvé qu'on était, ici, dans la droite ligne de la "culture rock à la Ardisson". Une bonne base, très loin de la mienne, qui est sans doute plus populaire, pour ne pas dire : prolétaire. Ce n'est de toute façon pas le même rapport. "Manque de Clash", concluait Lhisbei. Je suis d'accord, au moins là-dessus : le rock de ce livre, au titre pourtant guerrier, c'est du rock bon teint qui n'effraierait même pas ma grand mère. Dans cette histoire, l'auteur confronte un patron de multinationale du disque au fantôme de son passé grunge, de sa rock'n'roll attitude enfouie. L'idée est séduisante, mais elle est très mal exploitée, car elle repose sur une définition de la rock'n'roll attitude que le livre n'illustre jamais : adolescence éternelle, ode à la liberté, rage against le système. C'est respectable, mais quand on construit son livre comme une succession de slogans publicitaires, et qu'on a un style plus proche de Beigbeder, que de Lester Bangs...Cela fait un peu décalé. S'il suffisait d'avoir les bonnes références musicales pour être rock, Ardisson le serait, mais Dominique de Villepin aussi ; et Lemmy, de Mötörhead, qui avoue ne quasiment jamais écouter de rock, ne le serait pas. Mais Lenny Kratvitz, oui. Etc.

C'est pourquoi, quand par moment il y a un côté "name-dropping rock'n'rollement correct" (surtout au début), j'ai juste eu l'impression que l'auteur essayait de draguer la critique littéraire de Rock&Folk. Je ne sais pas si cela a marché. J'en doute, car il manque beaucoup de choses à ce livre, pour qu'il soit rock : la poésie, le romantisme, le côté "écorché vif ", de cet esprit. Le rock y donne le sentiment d'une caution que le livre, s'il racontait les déboires d'un ex joueur de mambo, n'aurait pas. Parce que j'ai trouvé que, si on enlevait le rock, il ne restait rien du livre. L'écriture est fade, le livre est mal rythmé, il n'y a pas vraiment de construction, il n'y a qu'un seul personnage pourvu d'un caractère (complètement cliché, hélas)...Juste de la formule facile, beaucoup d'esbroufe...Un très joli titre, il faut le dire, qui m'a fait envie pendant longtemps ! Un super slogan, une belle couverture pour emballer, qui donnent envie d'acheter le produit. Le teaser, c'est un peu l'inverse du rock. Le plus drôle (ou triste) c'est que la morale de l'histoire, c'est que le rock ne meurt jamais, mais que ce livre prouve le contraire.

3 commentaires:

  1. Encore un beau coup de griffe ?! Je vois que Thom fait des émules..

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  2. Si ça se trouve, c'est génétique :(

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  3. Puisque tu as conservé ta vanne, je suis obligé de copier / coller mon commentaire initial à cette critique :-)

    Je ne suis pas d'accord sur ton truc de la culture rock façon Ardisson.
    Enfin si : évidemment je suis d'accord. Mais je ne suis pas d'accord pour l'appliquer à Thomas Clément. La culture rock façon Ardisson, comme tu dis, est particulièrement commerciale. Du côté de Clément on est quand même dans quelque chose de plus racé, pas forcément subversif (je suis d'accord) ni prolo (je valide)... mais plus racé quand même et, par le fait, beaucoup moins contestable.

    C'est marrant, ça, car tu ressors un article qui est l'archétype du truc dont j'ai un peu honte. Pourtant il est plutôt conséquent et convaincant... mais je n'écrirais plus du tout de trucs comme ça aujourd'hui, sur ce livre ou un autre (tu me diras : j'ai vieilli et progressé, c'est plutôt bon signe). Je me rends compte que j'ai dit beaucoup de bien de ce livre à l'époque et que deux ans après il ne m'en reste presque plus rien. Mais même six mois après en fait, j'avais déjà oublié. Produit de consommation immédiate ? Ce serait sans doute excessif, mais en tout cas rien de très marquant, rétrospectivement. La note que j'avais mise me semble même carrément excessive, mais c'est un peu le risque quand on critique à chaud. Pour te dire : j'ai tellement oublié le livre que j'ai aussi oublié de le rendre à sa proprio. J'ai même complètement oublié l'auteur, trop grave hype à l'époque et dont plus grand monde ne cause aujourd'hui (il existe encore son blog, d'ailleurs...? il est encore lu ? je n'en ai plus entendu causer depuis une éternité). Mais les précurseurs finissent souvent comme ça. En 1977-78 les punks anglais étaient cent fois plus écoutés que les Ramones. Le premier gros buzz bloguien a donc été violemment relativisé quand d'autres sont apparus, qui étaient plus importants et/ou plus intéressants. J'ai très certainement manqué de recul à l'époque, et j'ai même pas honte de le dire, résister aux déchainements de passions bloguiennes demandent un certain aplomb qu'on acquiert pas au bout de deux mois de blogging. Je maintiens cependant ma réflexion d'alors sur l'ineptie du concept de "roman de blogueur", connement condescendante... et je suis persuadé qu'à la relecture je trouverais bien encore un peu matière à y prendre du plaisir.

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