mercredi 18 juin 2008

"Ketala" - Fatou Diome

Parle à mes meubles, par Livrovore

Le « Kétala », au Sénégal, c'est lorsqu'une personne est décédée et que quelques jours après sa mort, toutes ses affaires sont réparties entre ses proches.
Mémoria vient de quitter la vie, et son mobilier va donc être réparti dans des endroits différents. Alors, dans ce délai des quelques jours avant d'être séparés, les meubles de Mémoria décident de se raconter chacun la partie de la vie de leur « maîtresse » qu'ils ont vécu. Ainsi, même séparés, ils connaîtront tous la vie entière de Mémoria et pourront entretenir son souvenir.

Fatou Diome a choisi de raconter la vie de Mémoria par la voix d'objets (canapé, montre, statuette, collier…), ce qui lui a permis d'apporter un regard extérieur à l'histoire de son personnage. Un point de vue non-humain, de surcroît. Cela fait donc réfléchir sur les réactions des Hommes, leur façon de penser, d'agir, de suivre le cours de leur vie… Car les meubles ne comprennent pas toujours les agissements de Mémoria et se posent donc des questions, analysent son comportement.

« Qu'ils soient dehors ou enfermés, debout ou allongés, éveillés ou endormis, tous les humains cherchent à tracer leur ligne, leur trajectoire dans la vie. Cette quête, consciente ou pas, avouée ou non, motive toutes leurs actions. »

On suit la vie de cette sénégalaise du début à la fin, entre son pays et la France, entre deux cultures, deux sociétés. Entre ses envies et ce qu'elle suit par tradition. Ce livre évoque donc forcément les dilemmes entre suivre la coutume de ses parents ou non, partir ou non, choisir sa vie ou suivre celle que l'on vous a destiné… Mais beaucoup de réflexions peuvent aussi nous concerner tous, dans nos choix de vie en général.

« C'est injuste, c'est injuste, mais dans la vie des hommes, tout est injuste ! A vouloir faire le bonheur de tous, on sacrifie le sien. Mais à vouloir faire son propre bonheur, on est parfois obligé de sacrifier celui des autres. Le tout est de savoir alterner intelligemment ces dispositions d'esprit, sans culpabiliser. Tout choix est admissible quand la conscience qui en décide est juste. »

J'ai aimé cette façon de se détacher du personnage en la suivant par le regard de ses objets. Cela permet également d'interrompre le récit par de petits dialogues entre les meubles, drôles ou qui font réfléchir, qui ponctuent l'histoire et la structurent. Et puis je suis assez attachée aux objets moi aussi, et j'aimerais bien savoir ce qu'ils penseraient, s'ils en avaient la capacité !

Un style original donc, un récit intéressant, à la fois drôle et sérieux, qui permet de se poser des questions sur nos « trajectoires de vie » et celles des autres, tout en dégustant un bon moment de lecture.

9 commentaires:

  1. Livro, tu as pensé à ce que ta PAL dirait de toi? ;-)

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  2. :D
    C'est un point de vue original qui donne envie d'y jeter un coup d'oeil.

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  3. Des meubles qui parlent! Ha! Les petits fainéants! S'ils ont le temps de blablater il est grand temps qu'ils commencent à AGIR: On a besoin des meubles qui rangent eux-mêmes tout ce qu'on met dedans, qui jetent ce qui n'a plus de valeur. Des chaises qui passent l'aspirateur. S'ils aiment bavarder qu'ils travaillent, si non qu'ils se taisent!
    (bon , il est à la bib donc hopla il est sur ma lal ;0) )

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  4. Zaph> Je ne préfère pas y penser ;-)

    Sandrounette> Oui ça vaut le coup d'oeil !

    Jeanne> C'est vrai que ça serait bien pratique !! :)

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  5. suis pas sûre d'avoir envie de connaître ce que les objets pensent de moi :-) par contre j'aimerai bien savoir ce qu'ils pensent de Memoria (franchement quelle idée, je ne la connais même pas...) ;-)

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  6. Lhisbei> C'est fou ce qu'en littérature on a envie de connaître la vie de gens qu'on ne connaît pas ;-)

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  7. Une chose est sûre : je n'aime pas trop ce que mon miroir dit de moi! :-)
    Mais l'approche de ce roman est très intéressante et originale.

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  8. Il n'y a pas que les meubles qui parlent: je viens de lire un article sur Les Bijoux Indiscrets, roman de Denis Diderot dans lequel un précieux anneau magique avait le pouvoir de dévoiler des mondes chargés d’érotisme et de fantasmes. :)

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  9. Putain de monde matérialiste! :-)

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