N’est pas barjo qui veut, par Lhisbei
Bienvenue à Point Reyes, trou perdu californien. Jack Isidore est un simple d'esprit qui vient d'une famille modeste. Il collectionne les objets bizarres et s'intéresse de façon « scientifique » aux phénomènes paranormaux. Il est un peu barjo (d'où le titre du livre). Jack à une sœur Fay, mariée à Charley, un nouveau riche, très travailleur mais assez beauf dans son genre. Fay, Charley et leur deux filles vivent un peu à l'écart des autres dans une superbe mais malcommode maison moderne, entourée d'un immense terrain où cohabitent harmonieusement un chien, un cheval, des moutons, des canards et des poules. A la suite d'une minable affaire de vol, Jack est pris en charge par sa sœur. Rapidement il va se transformer en bonne à tout faire et nous livrer le portrait d'une famille pas si bien que ça sous tous rapports. Sous le vernis des apparences se cache toute la monstruosité d'êtres humains ordinaires.
Philip K Dick nous brosse avec humour et un sens de l'horreur particulièrement développé le portrait d'une famille d'américains moyens. Il a une acuité particulière dans l'observation de ses semblables et nous restitue des personnages très réels. La construction du roman est originale : l'histoire est racontée par chacun des protagonistes au cours de chapitres différents, sans répétition ni redites. Une fois le livre commencé impossible d'en interrompre la lecture.
« Confessions d'un barjo » est l'un des romans non SF de Philip K. Dick. Il l'a écrit en 1959 mais n'a réussi à le faire publier qu'en 1975. Non pas parce qu'il est mauvais mais parce qu'à cette époque - et il parait que c'est toujours vrai de nos jours - quand on vous collait l'étiquette littérature de genre il était difficile de s'en débarrasser.
Comme nombre de romans de Dick celui-ci a fait l'objet d'une adaptation cinématographique. « Confessions d'un barjo », film français de Jérôme Boivin, avec Hippolyte Girardot est sorti en 1992.
Respect à l'auteur.
Je lui laisse le dernier mot (ceux d'une lettre datée du 19 janvier 1975) :
"Quand j'ai écrit « Confessions », j'envisageais de créer un personnage totalement idiot, ignare, dénué de tout sens commun, un symposium ambulant de croyances et d'opinions débiles... un paria de notre société, un être complètement marginal qui voit tout de l'extérieur et doit par conséquent se contenter de deviner ce qui se passe. En relisant le roman maintenant, je suis, à ma grande surprise, plus convaincu encore que Jack Isidore n'est pas un abruti; je suis sidéré de voir que sous le flot d'insanités qu'il débite en permanence, il possède une sorte de subconscient perspicace, peut-être capable d'appréhender en profondeur les événements... et merde, en finissant cette fois la lecture du roman, j'ai pensé avec stupeur : Il a raison, ma foi, ce vieux Jack Isidore ! Peut-être qu'il ne voit pas simplement les choses comme nous, mais, fait incroyable, beaucoup mieux à sa façon."
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Je viens de le finir et, en effet, le plus barjo de tous n'est pas celui que l'on croit! Jack Isidore n'est pas le plus fou de cette "famille" de barjo! Le beau-frère Charley en tient une sacrée couche quand même!
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