samedi 17 octobre 2009

"Mémoires d'un rat" - Andrzej Zaniewski

Rat(é), par Zaph

Quand on écrit (un roman) sur la vie des animaux, c'est difficile de ne pas céder à l'anthropomorphisme. C'est probablement même impossible. Comment savoir vraiment ce que pensent les animaux, ce qu'ils ressentent ?

Alors, tant qu'à faire, autant l'assumer complètement, l'anthropomorphisme. C'est ce que fait La Fontaine quand il fait parler un renard ; c'est pas vraiment à la psychologie des renards qu'il s'intéresse, mais à celle des humains, même si elle est un peu caricaturée pour les besoins de la démonstration.
C'est un peu différent quand Maeterlinck écrit "La vie des fourmis" (j'adore ce livre) ; il se place en observateur externe, mais ne se gêne pas pour décrire la vie des bestioles avec des termes propres aux comportements humains. Au-delà de l'observation amusée de ces sociétés de fourmis aux moeurs aussi étranges que complexes, c'est surtout le parallèle avec les sociétés humaines qui est le but souterrain de l'auteur.

Chez Andrzej, ce n'est pas la même approche, quoi qu'il en dise dans sa préface. Ce qui ne fonctionne pas pour moi, c'est que l'auteur donne la parole à un rat, sensé nous raconter ses "mémoires". Le bouquin est écrit à la première personne (en alternance avec des phrases à la seconde personne, par un effet de style incompréhensible).
Ce sont donc, les préoccupation d'un rat (principalement, bouffer et ne pas se faire bouffer, et accessoirement, copuler) qui nous sont contées au fil des pages, mais avec un langage parfaitement humain, au vocabulaire et à la syntaxe irréprochables.

Or, si je devais imaginer me glisser dans la tête d'un rat, je crois que je n'aurais pas une vision du monde aussi humaine. Il me semble que de ce point de vue, l'échec était inévitable. Finalement, ce livre ne m'apprend pas grand chose sur les rats, et rien sur les humains.

Les journées d'un rat sont donc extrêmement peu passionnantes (du moins pour le lecteur que je suis) : invariablement, le rat a faim, le rat bouffe, le rat a peur, le rat tue. Mais aussi, parfois, le rat voyage.

A la question "où vont les rats ?", je crois finalement que la réponse est assez évidente : "on s'en fout".

Bien plus délicat est de répondre à la question "où veut en venir cet auteur ?".
Ce n'est pas qu'il écrive mal ; sa prose n'est pas désagréable, si ce n'est le problème de l'anthropomorphisme, qui n'a cessé de me perturber jusqu'à la fin. Parce que si le but était que je m'identifie à un rat, c'est raté ; je ne suis jamais entré dans la peau de la petite bête (et je n'irai pas jusqu'à dire que je le regrette).

Est-ce que notre raton devrait être considéré comme un espion infiltré dans la société humaine ? On voit bien que le pays qu'il traverse est en guerre et sujet à toutes les violences, mais tout cela se passe en marge de sa vision et ne suscite que peu d'intérêt chez lui (sauf quand il y a un cadavre humain pour le dîner; s'il faut l'en croire, c'est un délice).

Est-ce que les humains ne valent pas mieux que les rats qu'ils abhorrent tant ? En d'autres mots, est-ce que nous sommes tous des rats ? Si c'est la thèse d'Andrzej, en tout cas, il n'a pas réussi à m'en convaincre.

Bref, je ne vois pas vraiment où il veut en venir, et j'aurais tendance à dire : "nulle part".

Ne reste qu'une impression d'ennui pour un livre que je risque d'oublier très rapidement.
Ah non, quand-même, je ne suis pas près d'oublier son horrible couverture !

3 commentaires:

  1. "les préoccupation d'un rat (principalement, bouffer et ne pas se faire bouffer, et accessoirement, copuler)" sont quand même très proche de celle de l'homme -au moins pour 2 items - non ? ;-)

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  2. L'homme n'ayant que deux préoccupations et le rat trois, celui-ci est donc la créature supérieure ! ;-D

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