Leçon d'inhumanité, par Ingannmic.
Un village frontalier avec l’Allemagne, après la 2nde guerre mondiale. Comme tout village, il compte ses notables (maire, notaire, instituteur), ses "brebis galeuses", et les plus respectables ne sont pas toujours ceux que l'on croit... Brodeck est l’un de ses habitants. Un soir, alors qu’il passe à l’auberge pour acheter du beurre, il y surprend une grande partie de la population masculine de la commune, qui vient de commettre un meurtre sur la personne de l’ « Anderer » -l’ « autre »-, un inconnu établi dans ladite auberge depuis quelques semaines. Dans un souci de justification, les hommes alors présents demandent à Brodeck de rédiger un rapport –lui qui de par sa profession en écrit déjà sur la faune et la flore de la région- pour expliquer les événements qui ont conduit à cet assassinat collectif.
Il est au départ un peu ardu de s’y retrouver dans ce récit : le narrateur suit le cours de ses pensées pour s’éloigner du rapport demandé, et passer sans transition de ses souvenirs de camp de concentration (dont il est un rescapé) à ses années d’étudiant, de son enfance aux événements survenus depuis l’arrivée au village de l’Anderer…
Et puis on finit par être en harmonie avec Brodeck, et par suivre sans difficulté ses différents pans d’histoire. Il livre peu à peu la clé de certains des mystères que dans un premier temps il évoque juste (le mutisme de sa femme Emelia, …), et au fur et à mesure de ces éclaircissements, c’est au cœur de l’infamie et la cruauté des hommes qu’il nous plonge, de ce qu’ils sont capables de perpétrer lorsque l’émulation de groupe les galvanise. A tel point que parfois, j’ai ressenti comme un trop-plein d’horreur : l’auteur ne laisse émerger que peu d’espoir, comme si les âmes justes –qui se retrouvent systématiquement dans le rôle de victimes- étaient en nombre bien insuffisant pour contrebalancer la noirceur des autres…
Ph.Claudel prend le parti de rester quelque peu vague : pas une seule fois le nom du pays où se déroule l’action n’est cité, et le lecteur devine que Brodeck est juif, car à aucun moment ce terme n’est employé. C’est comme s’il avait ainsi voulu sous-entendre l’universalité du mal, tout en donnant au lecteur suffisamment d’indices pour que celui-ci se réfère à des événements concrets et historiques, afin qu’il n’oublie pas que l’homme a réellement déjà prouvé qu’il était capable du pire, par ignorance, par superstition… par essence ?
Toujours est-il que c’est dans la plupart des cas la peur de l’autre qui provoque cette cruauté.
On retrouve dans « Le rapport de Brodeck » le pessimisme dont faisait déjà preuve l’auteur dans ses « Ames grises ». Certes, on ne peut pas vraiment qualifier cette lecture de réjouissante, mais il est parfois bon aussi de se rappeler la facilité avec laquelle l'homme peut se laisser aller à obéir à ses pires instincts…
Il est au départ un peu ardu de s’y retrouver dans ce récit : le narrateur suit le cours de ses pensées pour s’éloigner du rapport demandé, et passer sans transition de ses souvenirs de camp de concentration (dont il est un rescapé) à ses années d’étudiant, de son enfance aux événements survenus depuis l’arrivée au village de l’Anderer…
Et puis on finit par être en harmonie avec Brodeck, et par suivre sans difficulté ses différents pans d’histoire. Il livre peu à peu la clé de certains des mystères que dans un premier temps il évoque juste (le mutisme de sa femme Emelia, …), et au fur et à mesure de ces éclaircissements, c’est au cœur de l’infamie et la cruauté des hommes qu’il nous plonge, de ce qu’ils sont capables de perpétrer lorsque l’émulation de groupe les galvanise. A tel point que parfois, j’ai ressenti comme un trop-plein d’horreur : l’auteur ne laisse émerger que peu d’espoir, comme si les âmes justes –qui se retrouvent systématiquement dans le rôle de victimes- étaient en nombre bien insuffisant pour contrebalancer la noirceur des autres…
Ph.Claudel prend le parti de rester quelque peu vague : pas une seule fois le nom du pays où se déroule l’action n’est cité, et le lecteur devine que Brodeck est juif, car à aucun moment ce terme n’est employé. C’est comme s’il avait ainsi voulu sous-entendre l’universalité du mal, tout en donnant au lecteur suffisamment d’indices pour que celui-ci se réfère à des événements concrets et historiques, afin qu’il n’oublie pas que l’homme a réellement déjà prouvé qu’il était capable du pire, par ignorance, par superstition… par essence ?
Toujours est-il que c’est dans la plupart des cas la peur de l’autre qui provoque cette cruauté.
On retrouve dans « Le rapport de Brodeck » le pessimisme dont faisait déjà preuve l’auteur dans ses « Ames grises ». Certes, on ne peut pas vraiment qualifier cette lecture de réjouissante, mais il est parfois bon aussi de se rappeler la facilité avec laquelle l'homme peut se laisser aller à obéir à ses pires instincts…
Malgré tous les avis élogieux, je ne parviens pas à craquer pour lire ce roman... Pourtant, j'ai beaucoup aimé les Ames grises, et j'ai adoré La petite fille de Monsieu Linh !
RépondreSupprimerje suis germaniste et cela m'a aidé à comprendre ce livre superbe... Les mots de ce dialecte ( inventé ? ) ont la couleur profonde des forêts ou l'odeur du lard gras et évoquent toujours de vieux mythes ou de lointaines légendes . L'Anderer fait découvrir à Brodeck la pervenche des ravines . " je cherche cette fleur depuis tellement longtemps ... " dit Brodeck . Novalis, lui, cherchait la "blaue Blume" . Encore une référence à la littérature allemande. Le livre de Philippe Claudel, c'est à travers le meurtre de l'Anderer - la victoire de la barbarie sur la culture - ou comment le nazisme a pu naître au pays des musiciens, des philosophes et des poètes...
RépondreSupprimermerci ce resumé est bien fait
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