mercredi 2 décembre 2009

"Le livre des illusions" - Paul Auster

Discussion de comptoir, par Ingannmic et Zaph


- Tiens, salut Zaph, ça va ? Que lis-tu, en ce moment ?

- Ing, tu sais très bien ce que je lis, puisqu'on a décidé de le lire ensemble. Je lis "The book of illusions" de Paul Auster (sauf que moi, je le lis en VO, nananère). C'est pas parce que tu l'as terminé depuis une semaine qu'il faut en profiter pour rappeler une fois de plus que je suis un gros lambin !

- C'est vrai, où avais-je la tête (loin de moi l'idée de me moquer de toi, pour qui me prends-tu) ?
Et qu'en as-tu pensé ? En ce qui me concerne j'ai beaucoup aimé, surtout le procédé qu'utilise Paul Auster pour imbriquer les histoires les unes dans les autres...

- Moi aussi, j'ai beaucoup aimé. C'est vrai, je suis d'accord sur le procédé. Mais ce qui est remarquable, c'est qu'il ne semble pas du tout lourd. Pourtant, j'ai eu peur un moment, parce que raconter un film pendant des pages et des pages, c'est périlleux ! Mais Auster réussit à le faire très bien passer.
Et puis, ce qui est stimulant, c'est que non seulement les histoires sont imbriquées, mais elles se répondent de manière très subtile. Je ne suis pas sûr d'avoir détecté toutes les correspondances.

- Moi non plus.
Ce qui est fort, quand même, c'est qu'il parvient à nous absorber dans un espace-temps à part. Je m'explique : quand il nous raconte en détail les films d'Hector Mann, on oublie qu'on est en train de lire un roman qui lui-même parle d'un livre qui traite de ces films... pour être entièrement plongé dans ledit film ! Je crois que c'est dù au style très simple et descriptif de l'auteur : il s'oublie pour laisser la place à l'histoire et aux faits. Du coup, ça laisse la part belle à l'imagination du lecteur.

- Pour parler du thème (d'un des thèmes), il y a un rapport clair entre la destruction d'une oeuvre et la mort de son auteur, non ? On dit que les oeuvres d'art sont éternelles, ou confèrent une sorte d'immortalité à leur auteur. Est-ce que pour vraiment tuer un artiste, il faut aussi détruire son oeuvre ? Finalement, il n'y a que Chateaubriand qui s'en sort bien, dans l'histoire...

- Oui, si l'on considère que l'artiste recherche l'immortalité et la reconnaissance. Dans le cas d'Hector Mann, il m'a semblé que l'art était plus un but en soi qu'un moyen, puisqu'il n'a pas l'occasion de partager ses créations avec un public. En même temps, il semble le regretter puisqu'il considère cette non-diffusion de ses oeuvres comme une punition... mais il ne peut s'empêcher malgré tout de créer, et ce, sans les contraintes et les influences que peuvent habituellement subir les artistes, lorsqu'ils doivent rendre des comptes, se plier aux exigences commerciales du marché. Et il en résulte des oeuvres véritablement originales, novatrices. Serait-ce cela, l'art véritable ? Celui qui se suffit à lui-même, et dont la seule conception serait pour l"artiste un aboutissement ?
A vrai dire, Paul Auster m'a donné l'impression de poser ces questions sans donner de réponse, parce qu'il n'y a sans doute pas de réponse, tout simplement. Il explore, et nous fait explorer en même temps, les mécanismes qui poussent l'homme à réaliser des oeuvres d'art, et ceux qui poussent d'autres hommes à ressentir ces oeuvres, à être fascinés par elles... avec l'exemple de Zimmer, le personnage écrivain, qui lui, se plonge dans l'étude des films d'Hector Mann par instinct de survie, comme une bouée à laquelle il se raccroche pour ne pas sombrer après la mort de sa famille. Ainsi qu'il le dit lui-même, "(...) c'était alors pour moi la seule façon de vivre sans m'écrouler en morceaux".

- Oui, d'ailleurs, je ne parlais pas tellement de la diffusion de l'oeuvre, mais de sa simple existence. Mais c'est vrai que les interprétations sont multiples, et c'est ce qui est chouette.
Un autre aspect qui m'a marqué, c'est que malgré l'histoire à couches, les personnages sont bien dessinée. Même Hector Mann qui n'est présenté que de manière indirecte, est un personnage qui acquiert finalement une certaine richesse. Même les personnages secondaires sont habilement brossés, tu ne trouves pas ?

- C'est vrai. J'ai lu deux ou trois autres livres depuis, et pourtant, je me souviens très bien de tous ces personnages, y compris de ceux qui n'apparaissent qu'un court laps de temps, et aussi de ceux qui apparaissent dans les films d'Hector ! Je crois que c'est parce que comme je le disais plus haut, le style d'Auster exhorte le lecteur à l'imagination, et du coup, on s'investit complètement dans la lecture : on "voit" les personnages, et c'est vrai qu'en cela son style descriptif nous aide beaucoup. En fait, son livre est comme un film écrit...

- C'est sûr, il a le truc pour créer des personnages.
Je me souviens aussi des personnages de "Brooklyn follies" que j'ai lu il y a un bout de temps. En fait, je crois que je préfère encore celui-là. Mais c'est marrant, il parle aussi des thèmes de l'écriture et de la mort. Et toi, tu as lu d'autres livres d'Auster ? Quel est ton préféré ?

- Ma connaissance de cet auteur est très limitée : avant "Le livre des illusions", je n'avais lu que "Cité de verre" et "Revenants", qui sont les deux premiers volumes de ce qu'il a appelé sa "trilogie New-Yorkaise". J'avais bien aimé ces singuliers petits ouvrages (surtout le premier), que j'ai trouvés originaux. Mais j'ai tout de même préféré celui-là, et nul doute que j'en lirai d'autres (pourquoi pas "Brooklin Follies", justement ?).

- Ah, celui-là, je te le conseille. Je suis sûr que tu aimeras !
Lire aussi l'avis de Thom

2 commentaires:

  1. Etrangement je suis moi-même à la 328ème page de ce roman et c'est vrai que Paul Auster arrive à nous accaparer l'esprit visuellement parlant !
    "La nuit de l'oracle" est aussi très bon !

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  2. Je me disais justement que je me relirais bien un Auster. Il est dans ma pile de livres à lire celui-ci. Donc je vais y penser... d'autant que je suis assez fan de l'oeuvre de Auster! "La nuit de l'oracle" est également dans ma pile en attente de lecture... reste à faire mon choix! Choisir mon camp...

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